Depuis le début du confinement j’ai pu observer avec mes patients et mon entourage, une certaine tendance :
- Au debut les niveaux de stress et d’anxiété étaient tres hauts. Nous n’avions jamais vécu un confinement, nous commencions à nous rendre compte de la taille du problème, le changement était énorme et abrupte… La peur (ou le manque de peur – dissociation) était bien palpable.
- Au bout de 2 ou 3 semaines de confinement les émotions ont commencé à descendre, et même si la frustration et la peur de l’inconnu étaient présents, nous avions (pour la plupart) réussi à trouver une certaine routine, un quotidien de confinement auquel nous nous étions plus ou moins habitués. Finalement, telle est notre nature, nous sommes capables de nous habituer et de survivre (et même vivre) dans les situations les plus défiantes. C’était un peu comme être dans un bulle, légèrement écartée de la réalité, une parenthèse, une réalité temporaire qui nous gardait de regarder trop loin en avant.
- Avec l’annonce du déconfinement, la peur qui était un peu dormante est de nouveau bien palpable. Les murs de la bulle sont tombés et avec le déconfienement on commence à se reposer des questions par rapport à ce futur incertain : Vais-je pouvoir embrasser ma grand-mère bientôt sans la mettre en risque ? Comment est-ce que mon business va pouvoir s’en sortir ? Quand est-ce que je vais pouvoir jouer avec mes copains et copines à nouveau ? Combien de temps jusqu’à reprendre la normalité ? Et ça va être quoi cette normalité ?
Nous avons peut être le droit de ressortir… mais et l’envie ? Et si la peur est plus forte que notre envie de sortir et socialiser ?
Premièrement jai envie de dire que tout est bien, toutes ces inquiétudes sont normales et il est important de se permettre de ressentir toutes les émotions qui sont présentes.
L’inquiétude est la pour nous dire qu’il y a un sujet qui mérite notre temps et notre attention, afin qu’on y réfléchisse et qu’on trouve la meilleure façon d’agir.
Elle nous empêche d’être présents dans le moment présent, avec nos pensées toujours dans un futur incertain que nous ne savons même pas s’il existera.
Voici donc quelques astuces que j’utilise pour ces moments de défi :
1. Faites des activités qui vous aident à vous sentir en sécurité
Ce n’est pas en vous forçant trop et en vous mettant dans des situations qui vous font peur juste « parce qu’il faut le faire » que vous allez instiller un sens de sécurité dans vous.
Demandez vous :
Dans quelles situations je me sens en confiance et sécurité aujourd’hui ?
Des endroits en particulier ? Des personnes ?
Y a-t-il certains exercices (respirations, étirements, yoga…) qui m’aident à me sentir plus calme ?
Si le transport publique vous fait trop paniquer, achetez-vous un vélo.
Si voir tous vos amis d’un coup vous semble trop, expliquez-leur ce que vous ressentez et voyez les un par un, à l’extérieur et avec la distance de sécurité.
Faites des petits pas… mais toujours dans la bonne direction.
2. Établissez un bon équilibre dans vos activités.
Faire tout le temps la même chose, même si c’est quelque chose que nous adorons, n’est pas suffisant pour nous sentir épanouis.
Avec la situation actuelle et même avec le déconfinement, beaucoup de nos routines et activités quotidiennes ont changé et nous pouvons avoir des difficultés à faire les choses qui d’habitude nous permettent d’assurer notre bien-être… il est temps de se re-inventer.
Afin de re-trouver un equilibre dans votre quotidien, les études montrent qu’il faut trouver l’équilibre entre ces 3 types d’activités:
- Activités qui vous procurent du plaisir : des activités qui vous plaisent et vous rendent heureux comme lire un bon livre, regarder un film comique, danser ou chanter, vous relaxer dans le bain, manger votre plat préféré….
- Activités qui vous procurent une sensation de réussite : des activités qui nous font sentir utiles et productifs, car nous nous sentons bien lorsque nous avons réussi ou accompli quelque chose. Ce pourrait être par exemple ranger la maison, jardiner, finir quelque chose pour le travail, écrire ce post que tu as à moitié, faire un peu d’exercice ou envoyer des documents administratifs.
- Activités qui vous procurent de la proximité et de la connexion avec les autres : Nous sommes des créatures sociables ! Nous avons besoin de compagnie et de contact avec les autres. Dans le contexte de crise sanitaire actuel il est important de trouver des solutions créatives pour rester en contact avec amis et proches, et de garder une vie sociale, même si nous devons nous tenir éloignés physiquement. Les apéro-Skype, cours de Yoga-Zoom entre copines et maintenant aussi des réunions en extérieur de max 10 personnes avec distance de sécurité sont des excellentes idées.
Un déséquilibre entre ces activités peut créer des dégâts : par exemple, si vous passez la plupart de votre temps à travailler sans consacrer de temps au plaisir ou à parler à des gens, vous pourriez commencer à vous sentir déprimé/e et isolé/e. À l’inverse, passer la plupart de son temps à se détendre pour le plaisir, sans faire des activités qui soient importantes pour soi, pourrait également avoir un effet sur notre état d’esprit et notre estime de soi.
Faites un bilan à la fin de votre journée et si vous y trouvez des déséquilibres songez à mieux faire demain 🙂
3. Pratiquez l’arbre décisionnel (schéma décisionnel) avec vos problèmes
Afin d’identifier, premièrement, s’il s’agit d’un problème réel et tangible (problème du moment présent pour lequel il faut trouver une solution) ou d’un problème hypothétique (« et si… », « peut être que… ») et ensuite voir s’il y a queque chose que nous pouvons y faire.
Simple et plus facile à dire qu’à faire… mais ça aide à y voir plus clair.
4. Organisez des moments pour penser à vos inquiétudes et aux moyens d’y faire face
Pendant ce confinement, nous avons établi à la maison « le quart d’heure anxiogène » pendant lequel nous regardions les infos à la télé et nous essayions de voir un peu ce qu’il se passait dans le monde. Un petit quart d’heure tous les jours était suffisant pour nous.
Cette technique sert pour beaucoup de choses, aussi à gérer votre inquiétude : établissez un moment dans la journée pour laisser libre votre inquiétude, et le reste du temps apprenez à la remettre à plus tard.
Si la réponse est « oui », faites-le.
Si la réponse est « non », écrivez ce qui vous inquiète sur un papier afin d’être sûr de ne pas oublier, et remettez-la à plus tard, remettez-la à la « Demie heure (quart d’heure / 45 minutes…) des Inquietudes».
En vous entrainant à remettre vos inquiétudes à plus tard vous apprenez à contrôler vos pensées et votre attention, comme dans une médiation .
C’est comme pouvoir dire à vos inquiétudes « Ok, je sais que tu es la et je vais écouter ce que tu as à me dire, mais pas maintenant ».
Quand vous les laissez passer, vous pouvez prendre le temps de faire quelque chose qui vous rend plus calme et plus en sécurité, afin d’attaquer la « Demie heure des Inquiétudes » en y voyant un plus clair et pouvoir trouver des solutions et la meilleure façon d’agir.
5. Pratiquez l’auto-compassion.
Quand vous échouez, quand vous ne vous sentez pas capables, quand vous vous jugez pour avoir de la peur ou pour ne pas avoir assez de ressources… comment vous traitez vous ? Traiteriez-vous de la même façon la personne que vous aimez le plus ?
Je vous propose un exercice d’auto-compassion inspiré d’une technique traditionnelle de thérapie Cogitive-Comportementale que j’ai modifié afin de le rendre un peu plus somatique :
Prenez papier et crayon et écrivez :
Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Avec qui étiez-vous? Que faisiez-vous? Où étiez-vous? Quand cela s’est-il passé?
Exemple : J’étais en train de regarder le chiffres d’affaires de mon entreprise qui s’écroule.
Qu’avez-vous ressenti dans votre corps ? Quelles émotions étaient présentes ? (Évaluez l’intensité entre 0 et 100%)
Exemple : Anxiété, sensation grandissante de panique, noeud dans l’estomac et sensation de nausée en augmentation.
Qu’est-ce qui vous est venu rapidement à la tête? (Pensées, images, souvenirs)
Exemple : Je suis nul/le, je ne suis pas assez performant/e, je ne suis pas assez bon/ne dans mon métier, je suis inutile… Mon père me le disait bien depuis tout petit et il avait raison… Que va-t-il nous arriver à ma famille et moi ? Comment va-t-on s’en sortir ?
Connectez-vous avec les sentiments de bienveillance et compassion : Quelle autre pensée pourriez-vous donner à cette situation ? Quelle autre explication ? Quelle réponse donneriez-vous à votre meilleure ami/e si il/elle était dans cette même situation ?
Exemple : Je suis en train de tout mettre en place pour réussir mais la situation actuelle n’est pas du tout facile. Je dois garder de l’espoir et continuer à travailler et à faire de mon mieux, ainsi qu’avoir un plan B au cas où. Je suis capable d’aller de l’avant, je suis capable de me donner à fond, je fais confiance à mes capacités.
Après avoir donné la Réponse bienveillante, comment vous sentez vous ? Qu’est-ce que vous ressentez dans votre corps ? Comment est elle votre respiration ? Quel est l’état de tension de votre corps ? Quelles émotions sont présentes ? Sentez les changements qui se sont produits.
Exemple : Soulagement et sensation de légèreté, je respire mieux, plus lente et profondément. La peur est toujours la mais j’arrive à la gérer et je sens ma force intérieure. Mon dos est plus droit et ma tête plus haute.
Prenez du temps pour laisser que ces bonnes sensations s’ancrent en vous. Rappelez-vous « C’est comme ça que je suis quand je suis compassif/ve avec moi même ».
Exemple : Toutes ces sensations et émotions font partie de moi et je sais comment y accéder : c’est comme ça que je suis quand je suis compassif/ve avec moi même. Je ne vais plus oublier.
6. Entraînez-vous à la Pleine Conscience.
La Pleine Conscience est l’art d’être dans le moment présent, et comme tous les arts, cela se pratique, s’apprend et s’améliore.
Apprendre et pratiquer la Pleine Conscience peut nous aider à vous débarrasser de beaucoup de nos soucis tout en nous ramenant au moment présent et à la réalité.
Quelques exercices pour la pratiquer :
- Concentrez-vous sur votre respiration et prenez conscience de l’air qui rentre et qui sort, les parties du corps qui bougent, la température de l’air quand il rentre et quand il sort…
- Mangez un aliment en étant conscient de son odeur, de sa texture, des sensation qu’il y a dans la bouche, des muscles qui bougent quand on mastique, quand on avale…
- Prenez une douche en sentant l’eau qui coule sur votre peau, les sensations de chaque partie de votre corps, les changements selon la température de l’eau…
Il y a une infinité d’exercices, vous pouvez en faire un de différent tous les jours ou simplement mettre un minuteur et être en pleine conscience pendant 10 minutes ou un quart d’heure.
Ceci dit, il est presque impossible de rester en pleine conscience h24, mais en nous entrainant un petit peu tous les jours nous pourrons retourner plus facilement dans le moment présent quand nous sentons que nos inquiétudes partent trop loin.
J’espère que ces petits conseils vous serviront au dela du moment du déconfinement, pour mieux pouvoir gérer tous les moments de difficulté dans vos vies.